George Jackson est né à Chicago le 23 septembre 1941. En 1960, il est accusé d’avoir volé 70$ dans une station service et condamné à une peine de prison d’une durée indéterminée… Il n’en sortira plus jamais. Incarcéré une première fois à la prison de Soledad en 1961, il est transféré en 1962 à San Quentin. Le racisme et les conditions de détention abjectes qui y règnent le poussent à dénoncer de tels traitements. Sa résistance, et l’engagement politique qu’il nourrit au fil de ses nombreuses lectures seront pour l’administration autant de raisons de repousser indéfiniment sa libération.
En 1966, il lance des groupes d’études portant sur les travaux de penseurs tels que Marx ou Fanon, puis fonde avec W. L. Nolen la Black Guerrilla Family, un groupe révolutionnaire qui entend combattre le racisme et défendre la dignité des prisonniers. Il devient, ce faisant, au coeur même du monde carcéral un membre actif de cette lutte armée qui se développe au même moment à travers les États-Unis sous des formes variées.
Au début de l’année 1969 il est renvoyé à Soledad. Le 13 janvier 1970, un groupe de prisonnier, constitué de dix blancs parmi les plus racistes et de sept noirs connus pour leur engagement politique, est amené à « inaugurer » une nouvelle cours intérieure de la prison. Le piège tendu par l’administration ne manque pas de fonctionner et une bagarre éclate rapidement entre blancs et noirs. Opie G. Miller, un gardien (tireur d’élite) ouvre le feu à la mitrailleuse du haut de sa tourelle et tue trois des noirs : Alvin Miller, Cleveland Edwards et W.L. Nolen. Un blanc, Billy D. Harris, est blessé à l’aine et perdra un testicule. Quelques jours plus tard, le Grand Jury de la cour de Monterey « blanchit » Opie G. Miller en affirmant qu’il s’agit d’« homicides justifiés ». Une demi heure après que les détenus ont entendu le verdict diffusé à la radio, le gardien John V. Mills est retrouvé mourant dans une aile de la prison après avoir été battu et jeté d’un des étages supérieurs. Ceux que l’on appellera désormais les Frères de Soledad (George Jackson, John Clutchette et Fleeta Drumgo) sont accusés du meurtre.
Georges Jackson qui purge pour ainsi dire une peine à vie se voit ainsi, avec cette nouvelle accusation, menacé d’une condamnation à la peine capitale. Angela Davis, membre du Black Panther Party dont Georges Jackson deviendra bientôt l’une des figures emblématiques, prend très vite la tête du comité de défense des Frères de Soledad. Il s’agit pour Angela Davis d’une affaire montée de toute pièce en vue d’éliminer un révolutionnaire dangereux qui s’était mis à organiser ses camarades prisonniers. Au cours des mois suivants se déroule aux dépens des 3 de Soledad, une procédure entachée de nombreuses irrégularités.
En juin 1970, Georges Jackson est de nouveau transféré à la prison de San Quentin.
Le 7 août, profondément révolté par l’emprisonnement et l’injustice qui touchent son frère, et alors qu’à travers le pays un nombre croissant de noirs américains luttent avec acharnement contre le racisme et les lynchages dont ils sont régulièrement les victimes, Jonathan Jackson, âgé de 17 ans, se rend au tribunal de San Raphael où se déroule le procès d’un autre détenu de San Quentin, James McClain, accusé d’avoir poignardé un surveillant. Étant parvenu à introduire des armes à feu dans le tribunal, il en remet une au prisonnier ainsi qu’à deux autres détenus présents comme témoins, Ruchell Magee et William A. Christmas. Les quatre hommes prennent en otage le juge Haley, le procureur Gary Thomas, ainsi que trois femmes parmi les jurés, Maria Elena Graham, Doris Whitmer et Joyce Rodoni. À la police et aux journalistes, qui les voient sortir avec les otages pour s’enfuir avec la camionnette qui les attend à l’extérieur, Jonathan déclare : « Nous sommes révolutionnaires. Libérez aujourd’hui les Frères de Soledad, avant 12h30. » Alors que leur véhicule démarre, une fusillade éclate avec la police au cours de laquelle seront tués Jonathan Jackson, James McClain, William A. Christmas et le juge Haley. Les autres sont plus ou moins grièvement blessés. Ruchell Magee, unique militant à avoir survécu ce jour-là fut par la suite condamné à la prison à vie. Angela Davis qui est accusée d’avoir fourni les armes de cette prise d’otages sera bientôt arrêtée à New-York, emprisonnée 22 mois, puis en définitive libérée en juin 1972. Georges Jackson publie cette même année 1970, Les Frères de Soledad — Lettres de prison de George Jackson, un ouvrage qui réunit pour l’essentiel sa correspondance de 1964 à 1969, livre depuis devenu célèbre, et qu’il dédie alors à sont frère Jonathan. La tentative de son frère pour le libérer ainsi que le soutien grandissant dont il bénéficie à travers le monde ne feront qu’accroître l’hostilité de la justice à son égard.
Le samedi 21 août 1971, après 12 ans d’emprisonnement pour avoir été complice d’un vol de 70$, et trois jours avant son jugement, Georges Jackson est tué à la prison de San Quentin au cours de ce que les autorités affirmeront avoir été une tentative d’évasion. Trois autres détenus, ainsi que trois gardiens, perdront la vie ce jour là.